Plus de 17 millions de séropositifs prennent des antirétroviraux dans le monde. Ces traitements ont révolutionné la prise en charge du VIH. Ils permettent une bonne maîtrise de la charge virale et stoppent l’évolution du virus. Mais celui-ci continue de progresser malgré tout, dans les tissus de différents organes. Une étude de l’université de Californie à San Francisco (Etats-Unis) l’a montré dans le Journal of Virology. Elle a utilisé pour cela les corps de plusieurs séropositifs. Certains étaient traités, d’autres non.
Un virus persistant
Les chercheurs ont observé le profil génétique du VIH chez des patients décédés après 1984. Les variations permettent de comprendre comment le virus a évolué et en quoi le traitement a affecté son développement.
Mauvaise surprise : « Nous avons découvert que le VIH ne semblait pas affecté par les antirétroviraux dans certaines zones », explique Michael McGrath, principal auteur de l’étude. Autrement dit, il évolue de la même façon au sein des deux populations. Les médicaments réduisent bien la charge virale dans le sang. Mais pas un seul patient n’était indemne de VIH au niveau des tissus solides.
Le virus continue de migrer sans la moindre perturbation dans des organes tels que les poumons, le foie ou encore la rate et le cervelet. Dans les ganglions lymphatiques non plus, le VIH n’est pas affecté. Il s’agit en effet d’un des principaux réservoirs.
« Nous n’avons pas relevé de trace de résistance aux médicaments, ce que nous aurions observé si le virus avait été exposé à ceux-ci », ajoute Michael McGrath. Un résultat attendu chez les séropositifs « naïfs » de traitement, mais bien plus surprenant chez les autres.
Des pathologies typiques
Cette conclusion peut inquiéter, mais elle se révèle riche d’enseignements. Parmi les corps autopsiés, 95 % présentaient une athérosclérose. Maladies cardiovasculaires et neurologiques sont également fréquentes chez les personnes qui vieillissent avec le VIH. L’espérance de vie augmente et de nouvelles pathologies apparaissent parfois. C’est le cas d’un déclin cognitif typique de cette population.
Pour la première fois, une piste d’explication apparaît : le virus continue d’infecter les macrophages qui s’attaquent au tissu. Il contribue donc indirectement aux maladies qui ne sont pas associées au sida, stade avancé de l’infection. Voilà qui permettrait de comprendre la forte prévalence des cancers chez les séropositifs, particulièrement ceux d’origine infectieuse. Cette étude souligne aussi la nécessité de poursuivre le recours aux antirétroviraux sans pour autant s’en contenter. Une solution définitive à l’infection doit être trouvée et cibler également les tissus.