La découverte fondamentale de chercheurs français qui ouvre la porte à un traitement définitif contre le sida.
Les scientifiques ont enfin trouvé un moyen d’identifier les cellules dans lesquelles le virus du VIH survit à l’état dormant, malgré les trithérapies. La découverte fondamentale de chercheurs français qui ouvre la porte à un traitement définitif contre le sida. Voilà plus de trente ans que les scientifiques cherchent un moyen de venir à bout du Sida.
Si les trithérapies ont réussi à contenir l’action du VIH, il est pour le moment impossible d’éradiquer totalement le virus.
Mais les choses pourraient bien changer dans les années à venir grâce à une importante découverte réalisée par des chercheurs français, dont les travaux sont publiés ce mercredi 15 mars dans la revue Nature. Si les traitements actuels ne peuvent éradiquer définitivement le VIH (et nécessitent la prise, à vie, de médicaments), c’est à cause des « cellules réservoirs ». Appelées T CD4 , ces cellules immunitaires peuvent héberger une version dormante du VIH. Un peu comme des porteurs sains. Si la trithérapie est arrêtée chez un patient, le virus contenu dans ces cellules peut se réveiller, se multiplier et se répandre dans l’organisme. Logiquement, une des pistes consiste à tuer ces cellules réservoirs. Mais autant chercher une aiguille dans une gigantesque botte de foin: il n’y a qu’un porteur sain pour un million de cellules T CD4 .
La prouesse de l’équipe française est d’avoir trouvé un moyen pour identifier facilement ces réservoirs.
Un drapeau pour repérer les cellules infectées.
« Nous avons mis en place un modèle de laboratoire qui récapitule les caractéristiques de la cellule réservoir », explique au HuffPost Monsef Benkirane, chercheur au CNRS de l’université de Montpellier, co-auteur de l’étude. Pour faire simple, ils ont réussi, in vitro, à infecter des cellules saines pour qu’elles deviennent des porteurs sains du virus. « Cela a été possible grâce à nos précédents travaux de 2011″, précise-t-il. Ils ont ensuite réussi à isoler 103 gènes qui sont actifs uniquement quand la cellule est contaminée par le VIH. Ces gènes servent notamment à créer une protéine bien spécifique, qui se trouve à la surface de la cellule et donc facilement identifiable, appelée CD32a. Or, cette protéine n’est jamais présente sur une cellule saine, mais elle l’est sur la moitié des cellules réservoirs. Bref, une sorte de drapeau rendant visibles les réservoirs au milieu de la masse de cellules T CD4 . »De plus, si l’on regarde les cellules contenant un virus compétent, qui peut infecter l’organisme, soit une sur dix, la protéine est présente dans 80% des cas », précise Monsef Benkirane. Ces résultats ont été obtenus à partir d’échantillons sanguins de douze patients atteints du VIH.
D’autres marqueurs d’ici un an ou deux?
Si l’on est encore loin d’un traitement définitif contre le VIH, il y a tout de même des raisons d’être optimiste.
« La porte était fermée, elle est maintenant ouverte », lance Monsef Benkirane, qui met tout de même en garde:
« Le VIH nous a beaucoup surpris, il faut rester prudent, on n’en est pas encore là ».
Justement, quelles sont les perspectives?
Il va dans un premier temps falloir préciser cette découverte: quel est vraiment le rôle de cette protéine, savoir combien de cellules réservoirs sont touchées et est-ce que celles qui ne sont pas présentes dans le sang disposent aussi de cette protéine. Mais aussi vérifier si la centaine de gènes spécifiques découverts ne permet pas de trouver d’autres marqueurs pour cibler encore plus efficacement les cellules dormantes. Cela pourrait aller assez vite. « D’ici un an ou deux, on aura une cartographie complète », estime le chercheur. « Un traitement pourrait arriver dans quelques années »
Si jamais tout se passait au mieux, « un traitement pourrait arriver dans quelques années », espère Monsef Benkirane, qui précise que beaucoup de chercheurs vont partir de cette découverte pour cibler les cellules réservoirs.
Ces travaux ont été réalisés via une collaboration entre le CNRS, l’Université de Montpellier, l’Inserm, l’Institut Pasteur, l’Institut de recherche vaccinale et plusieurs hôpitaux. Le CNRS a justement déposé un brevet sur l’utilisation de ce détecteur de cellules réservoirs.
Il faudrait pour autant de longues années pour qu’un hypothétique traitement soit ensuite vérifié et autorisé sur le marché. Il faut comme toujours rester prudent, en attendant de découvrir le chemin qui se dessine maintenant que cette porte est ouverte.
Gregory Rozieres Journaliste sciences et technologies, responsable de la rubrique